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Cheval Le tissage de crin au service de l'industrie du luxe

Un atelier unique en France qui fabrique une étoffe à base de crin de chevaux depuis près de 200 ans dans la Sarthe, a entrepris de conquérir de nouveaux marchés après avoir été racheté par le géant du luxe Hermès.

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A l'ombre de l'église du petit village de Challes, près du Mans, une quinzaine de tisseuses se relaient, dans l'atelier Le Crin, sur des métiers à tisser datant de 1905. Elles en font sortir une étoffe destinée à l'ameublement, à la fois souple et résistante. Sur une trame de lin, de coton ou de sisal, la tisseuse présente un à un les brins de crin qui sont attrapés par la navette, une règle en buis, qui les entraîne vers la chaîne du tissu. La laize, ou largeur de tissu, ne dépasse pas celle de la longueur du crin, c'est à dire de 55 à 65 centimètres.

Le crin vient aujourd'hui de Mongolie, où il faut cinq queues de cheval pour fabriquer une tresse de 5 cm d'épaisseur. Ces tresses sont rangées dans des casiers, montant jusqu'au plafond de l'atelier, selon leur couleur: noir, gris foncé, blanc, ou alezan. Ce tissu imputrescible a connu un grand succès au XIXe siècle lorsqu'il recouvrait les sièges de diligence ou les fauteuils de l'époque second empire. Il a ensuite peu à peu décliné et l'atelier est passé de main en main, avant d'être racheté par le groupe Hermès en 1995. "Nous sommes deux dans le monde à faire ce métier", indique Olivier Nourry, directeur général de la Ceda, maison mère de la société Le Crin, et dont Hermès est l'actionnaire principal. Outre Challes, une autre fabrique existe en Angleterre.

La Chine s'est aussi lancée dans le tissage de crin de cheval, "mais sur des chaînes en polyester, ce qui ne donne pas le même genre de produit", assure M. Nourry. "Nous sortons 4.000 mètres de tissu par an", soit trois mètres par jour et par ouvrière, précise le patron. "Il est tissé lentement. C'est ce qui crée l'engouement pour ce produit de qualité, exclusivement naturel". "Je suis une perfectionniste", témoigne Marie-Claire Grigon, tisseuse depuis six ans, tandis que Anita Clavier, entrée dans l'entreprise en 1978, évoque son plaisir "à donner une âme au tissu". "Nous avons des clients prestigieux qui travaillent avec la production de tissu classique", raconte M. Nourry, en citant "les palais royaux à travers le monde ou les musées nationaux".

Mais les jeunes créateurs s'intéressent également à cette matière. 500 mètres de tissu aux motifs contemporains ont ainsi été récemment commandés pour recouvrir les têtes de lits, lors de la rénovation d'un grand hôtel parisien. Pariant sur l'innovation pour ouvrir de nouveaux marchés, Le Crin utilise une nouvelle technique, le guipage, qui résoud le problème de l'étroitesse des laizes et lui permet de proposer des voilages en crin, en plus grande largeur. La société vend également à Hermès, pour des sacs, ou Chanel. Et "nous sommes approchés par d'autres marques célèbres", annonce M. Nourry, qui n'exclut pas de collaborer aussi avec l'industrie de la chaussure, de luxe évidemment.

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